le 26 janvier 2022
20.4.254
Contexte
Le 14 juin 2011, le CNM a publié un communiqué qui précisait la définition de « grand public » parce qu’il s’agissait d’une question souvent examinée par le Comité de la santé et de la sécurité au travail. Le Ministère X a par la suite publié un bulletin daté du 18 mars 2013 à l’intention de son personnel, dans lequel il décrit les critères à prendre en compte dans le paiement de l’indemnité de premiers soins.
En réponse au bulletin, le Ministère X a reçu 1 054 griefs dans lesquels des employés ont contesté la décision de l’employeur de refuser rétroactivement l’indemnité de premiers soins au-delà du 14 juin 2011, conformément à la Directive sur l’Indemnité versée aux employés qui dispensent les premiers soins au grand public (la Directive). Le 7 mai 2015, le Comité exécutif a atteint une impasse dans cette question (20.4.244). Ce grief a ensuite été renvoyé à la Commission des relations de travail et de l’emploi dans le secteur public fédéral (CRTESPF), et il a été rejeté le 17 janvier 2019.
Les fonctionnaires s’estimant lésés dans la présente affaire sont des employés du Ministère X qui demandent à recevoir l’indemnité de premiers soins. Bien que les premiers soins soient mentionnés dans leur description des fonctions, la fréquence à laquelle ils dispensent les premiers soins est contestée. Le Ministère est d’avis que la prestation de premiers soins fait partie intégrante de leur responsabilité, et cela fait en sorte qu’elle devient une fonction normale. Par conséquent, le Ministère est d’avis que les fonctionnaires s’estimant lésés ne satisfont pas aux critères de versement de l’indemnité de premiers soins.
Grief
Les fonctionnaires s’estimant lésés contestent le fait qu’ils sont formellement tenus par leur ministère de dispenser sur une base régulière, et en plus de leurs fonctions normales, les premiers soins au grand public, mais qu’ils ne reçoivent pas l’indemnité de premiers soins au grand public, conformément à la Directive du CNM.
Présentation de l’agent négociateur
Le représentant de la partie syndicale est d’avis que les fonctionnaires s’estimant lésés n’ont pas été traités conformément à l’esprit de la Directive. Le représentant a attiré l’attention du Comité sur l’article 5.1 – Employés admissibles, qui décrit les quatre conditions qui doivent être satisfaites pour qu’un employé soit admissible à l’indemnité de premiers soins et a confirmé que les fonctionnaires s’estimant lésés avaient satisfait à toutes les conditions. Il a également attiré l’attention du Comité sur l’article 5.2 – Personnes exclues, qui décrit deux exclusions à l’indemnité, et a noté qu’elles ne s’appliquent pas aux fonctionnaires s’estimant lésés.
Le représentant a expliqué que le Ministère avait toujours soutenu que les exclusions s’appliquent à ce groupe, faisant valoir qu’être un premier répondant est inhérent à leur description de travail et que, par conséquent, les employés sont déjà rémunérés dans leur salaire annuel pour les activités de premiers soins dispensées. Le représentant a fait valoir que c’était inexact. On a expliqué qu’ils fournissent des premiers soins aux personnes dans le besoin, et ils le font dans le cadre de l’exécution de leur travail non pas en tant que premiers répondants, mais en tant qu’agents de la paix.
Le représentant a noté que la Directive vise à rémunérer les employés qui doivent dispenser des premiers soins au grand public. Les fonctionnaires s’estimant lésés sont tenus de le faire, et ils sont formés en premiers soins. Le représentant a noté que l’une des principales activités de leur description des fonctions indique qu’ils offrent la [traduction] « capacité de première intervention avec des pouvoirs d’arrestation et/ou de détention des personnes soupçonnées d’avoir commis des infractions en vertu de diverses lois ». Le représentant a fait valoir que le Ministère n’applique pas correctement le terme « première intervention », ce qui laisse entendre que la première intervention et le premier répondant sont interchangeables. Le représentant a soutenu que les fonctionnaires s’estimant lésés offrent une première intervention en tant que première ligne aux frontières du pays, avec le pouvoir d’arrêter et de détenir des personnes soupçonnées d’avoir enfreint la loi; ce n’est pas la même chose que pour les premiers répondants en cas d’urgence médicale. De plus, le représentant a comparé les fonctionnaires s’estimant lésés aux agents des pêches qui reçoivent l’indemnité de premiers soins. La description des fonctions des agents des pêches prévoit seulement qu’ils [traduction] « gèrent et offrent une intervention en cas de crise de petite échelle ». Le représentant a fait valoir que cela ressemble beaucoup à la description des fonctions des fonctionnaires s’estimant lésés, qui précise qu’ils offrent la capacité de première intervention.
Le représentant a également noté que les professionnels qui fournissent une intervention médicale en tant que responsabilités inhérentes de leur emploi ont rédigé et mis en œuvre des procédures normales d’exploitation (PNE) en matière médicale afin de garantir des pratiques exemplaires et l’uniformité de l’application. Le représentant a noté que le Ministère n’avait pas de PNE pour les interventions médicales que les fonctionnaires s’estimant lésés doivent suivre. Le Ministère n’exige pas non plus qu’ils soient membres d’une association médicale ni qu’ils fournissent de l’équipement spécialisé et offrent de la formation spécialisée au-delà de la formation de base en premiers soins. Le représentant a expliqué que la formation médicale, y compris en premiers soins (qui n’est offerte que tous les trois ans), était souvent effectuée à l’interne, à l’exception de la formation et des examens annuels que les employés doivent passer pour répondre aux appels médicaux. Cependant, les pompiers, qui sont en fait de véritables premiers répondants, reçoivent une formation annuelle en premiers soins. Les pompiers sont également équipés de sacs médicaux qui contiennent de l’oxygène, des lecteurs d’oxygène dans le sang, des respirateurs, des dispositifs d’aspiration, des défibrillateurs et des civières. Les fonctionnaires s’estimant lésés ne sont pas équipés de façon comparable.
Le représentant a fait référence au Programme de subventions commémoratif pour les premiers répondants, dont le Ministère est responsable de faire rapport au Parlement. Le Programme définit le premier répondant comme étant [traduction] « une personne qui a été employée ou embauchée officiellement pour effectuer les tâches d’un policier, d’un pompier, d’un paramédical, d’un agent correctionnel, d’un agent de libération conditionnelle, ou d’un agent de probation par un service d’urgence canadien ». Le représentant a souligné que les professions énumérées sont très précises et que les postes des fonctionnaires s’estimant lésés ne figurent pas dans cette liste de personnes considérées comme des premiers répondants.
Le représentant a conclu en résumant que, si le Ministère avait voulu que les fonctionnaires s’estimant lésés soient les premiers répondants, il l’aurait écrit explicitement dans la description des fonctions, il aurait les inclus dans la définition de « premiers répondants » du Programme de subvention commémoratif pour les premiers répondants, il aurait publié des PNE qu’ils auraient dû suivre, il les fournirait plus qu’une simple formation en premiers soins, et il les fournirait plus d’équipement que des trousses de premiers soins de base. Toutefois, le Ministère n’a satisfait à aucune de ces exigences.
Les fonctionnaires s’estimant lésés n’ont pas été traités conformément à l’esprit de la Directive, et les griefs devraient donc être accueillis et des mesures correctives devraient être accordées.
Présentation du ministère
Le représentant de la partie patronale est d’avis que les fonctionnaires s’estimant lésés ont été traités conformément à l’esprit de la Directive. Le représentant a fait valoir que la Directive vise à indemniser certains employés qui sont tenus de dispenser, en plus de leurs fonctions normales, des premiers soins au grand public. Elle ne vise pas à indemniser les employés qui dispensent volontairement des premiers soins à leurs collègues ni les employés dont la prestation de premiers soins est une exigence inhérente de leur poste.
Le représentant a fait référence à l’article 5.1 de la Directive, qui décrit les quatre exigences qui doivent être satisfaites pour que les employés soient admissibles à l’indemnité de premiers soins. Le représentant a soutenu que les fonctionnaires s’estimant lésés ne satisfaisaient pas au deuxième critère, à savoir « être formellement tenus par le ministère de dispenser sur une base régulière, et en plus de leurs fonctions normales, les premiers soins au grand public », car cette condition est une exigence inhérente du poste des fonctionnaires s’estimant lésés; par conséquent, elle n’est pas « en plus de leurs fonctions normales ». De plus, le représentant a fait valoir que l’article 5.2 prévoit que l’indemnité de premiers soins ne sera pas versée aux employés dont la prestation de premiers soins est une exigence inhérente de leur poste. Le Ministère est d’avis que la prestation de premiers soins est une exigence inhérente des postes des fonctionnaires s’estimant lésés. Le représentant a également fait référence au communiqué du Comité de SST daté du 14 juin 2011, dans lequel il est indiqué que « l’obligation de dispenser les premiers soins au grand public ne doit pas constituer une activité principale du poste pour que l’employé ait droit à l’indemnité prévue à la présente directive ».
En vertu de la section relative aux activités principales de la description de travail des fonctionnaires s’estimant lésés, le représentant a renvoyé au deuxième paragraphe, qui précise que le position [traduction] « offre la capacité de première intervention avec des pouvoirs d’arrestation et/ou de détention des personnes soupçonnées d’avoir commis des infractions en vertu de diverses lois ». Le représentant a expliqué que la définition de « premier répondant » vise une personne ayant une formation spécialisée qui offre une aide immédiate ou précoce en cas d’urgence; la prestation de premiers soins fait partie intégrante de ces situations. Le représentant a poursuivi en notant que plusieurs références sont faites à l’exigence d’utilisation d’une force physique et d’un équipement de défense, ainsi qu’à la capacité de manipuler les armes à feu et les armes, et de les rendre sécuritaires afin d’assurer la conformité et la sécurité de l’agent, du client et des membres du public.
Le représentant a pris note de la section relative aux conditions de travail de la description de travail des fonctionnaires s’estimant lésés, où il est indiqué : [traduction] « Il y a un risque de blessures graves résultant d’agressions de personnes suspectes ou de personnes détenues ou arrêtées. Il n’y a aucun contrôle sur le moment où ces situations peuvent survenir, et elles peuvent survenir à des endroits éloignés des principaux lieux de travail. Il y a aussi la possibilité d’exposition à des marchandises dangereuses lors de l’examen de personnes, d’effets personnels, d’expéditions et de moyens de transport provenant de régions touchées par des maladies contagieuses. » Le représentant a souligné que le Ministère est responsable d’offrir des services intégrés qui appuient la sécurité nationale et la sécurité publique. Afin de s’acquitter de leur mandat, les fonctionnaires s’estimant lésés doivent composer avec des événements exigeants, et ils peuvent devoir intervenir physiquement auprès d’une personne afin de l’arrêter ou de la détenir. Il est possible que les fonctionnaires s’estimant lésés et les personnes les entourant subissent des blessures, et le représentant a expliqué que les fonctionnaires s’estimant lésés doivent réagir de façon appropriée en fonction de la situation.
Le représentant a également fait référence à Bouchard c. Conseil du Trésor, 2019 CRTESPF 5, dans laquelle l’arbitre de grief a conclu ce qui suit : « Il est clair que les [modifié] (postes des fonctionnaires s’estimant lésés) sont responsables d’offrir les capacités de premier intervenant, ce qui, selon M. Markell, comprend la dispense de premiers soins au besoin. Cela fait donc en sorte que la dispense de premiers soins à un voyageur fait partie intégrante des fonctions [modifié] (des postes des fonctionnaires s’estimant lésés). Les [modifié] (postes des fonctionnaires s’estimant lésés) sont tenus de dispenser les premiers soins, pas en raison de leur statut d’agent de la paix, mais parce que l’employeur a inclus cette obligation dans leur description de travail. » Le représentant a réitéré de nouveau que la prestation de premiers soins est une exigence inhérente des postes des fonctionnaires s’estimant lésés.
En conclusion, le représentant a soutenu que la prestation de premiers soins est une exigence inhérente des postes des fonctionnaires s’estimant lésés et que, par conséquent, les fonctionnaires s’estimant lésés ne sont pas admissibles à l’indemnité, conformément à l’alinéa 5.2b) de la Directive. Les fonctionnaires s’estimant lésés ont donc été traités conformément à l’esprit de la Directive, et les griefs devraient être rejetés.
Toutefois, le représentant a demandé que, si le Comité conclut que les fonctionnaires s’estimant lésés n’ont pas été traités conformément à l’esprit de la Directive, la rétroactivité soit limitée aux 25 jours ouvrables précédant la date des griefs.
Décision du Comité exécutif
Le Comité exécutif a examiné le rapport du Comité de la santé et de la sécurité au travail, qui a conclu que les fonctionnaires s’estimant lésés n’avaient pas été traités conformément à la Directive. Le Comité exécutif a accepté le rapport. Par conséquent, le Comité exécutif a accueilli le grief. Il a été noté que le représentant du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada (SCT) s’efforcera de parler directement au ministère au sujet des questions liées à la demande et au caractère rétroactif.